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Dune. Boucles blondes qui attrapent les rayons du soleil, garnement vautré dans l'herbe aplatie de jouets de bois. Il lève les yeux sur la figure paternelle, embaumée par l'odeur de tabac et de térébenthine. Les doigts qui effleurent la terre chaude d'un après-midi de printemps. Il abandonne les soldats peints et éteint docilement l'imagination enfantine qui colore ses matinées sans compagnon. Quitte la douce chaleur du jardin pour s'approcher de l'homme qui passe une main trop forte sur ses épaules, l'épiderme qui s'enflamme au contact imposé. Dune, va avec ta mère. J'ai du travail. Dans l'ombre fraîche de la petite maison, il discerne les joues mal rasées d'un étrange duo, avant que la porte du bureau ne referme ses élégantes dorures. Cuir et cigare contre huile et lin. Dune lève la tête, distingue un visage arrondi qui lui rend sa contemplation muette. Les prunelles qui retombent sur la poignée qu'il lui suffirait de tourner pour accéder aux secrets. Va avec ta mère. Les atomes du garçonnet aux boucles blondes se révulsent. Dune a enterré sa mère, dans un coin de sa mémoire. Figure qu'il cajole avec tendresse dans le noir. Doux sons des pieds nus qui frôlent le bois vernis de l'escalier. Elle a cette bouche timide et la main câline. Le ventre rond, aussi, comme ses joues roses lorsqu'elle esquisse un sourire. Les murmures d'une discussion leur parviennent. Alors elle l'entraine dans son petit salon, celui où elle chante si souvent lorsqu'il passe devant. Ta mère. Il a la haine facile le gamin. L'amertume aussi. Viens Dune, on va jouer. Ses grands yeux clairs, presque translucides derrière les mèches d'un brun qui rougit. Dune il déteste qu'elle le touche. Qu'elle soit si tendre, si fragile. Dune, sa mère, elle était tempête et bourrasque, elle riait fort et elle ne se cachait pas dans les étages quand son père recevait les voyous du quartier. Dune aimait les colères, les cris de rage, les insultes parfois. Il aimait la vie qui trépidait et hurlait dans ce corps chaud qu'elle pressait contre lui. Il aimait sa mère, celle qui chantait faux et fort, qui roulait avec lui dans l'herbe sèche. Il observe l'autre, la remplaçante de porcelaine qui se tient entre les murs avec cette incertitude qui fait trembler son petit corps délicat. Il glisse sa main dans la sienne, avec un soupir d'adulte dans un corps d'enfant, et ça la fait rire, ce rire d'oiseau qu'il a envie de plumer. Ses yeux tombent sur le ventre qui dissimule la vie. Il sera bientôt là, on sera bien tout les trois. Il la fixe, et elle sourit. Les mots s'entrechoquent sur sa langue, refusent de sortir. Quatre. Ils seront quatre. Il n'ose pas demander qui n'existe pas dans cet avenir fleuri qu'elle imagine.